Voici une prédication de Luc Badoux

Textes bibliques : Exode 3.1-10 : Moïse et le buisson ardent; Hébreux 3.1-6

Imaginez que l’on fasse seulement avec le Nouveau Testament (NT).

Au plan pratique : on aurait une bible plus compacte qui tient dans la poche.

Mais surtout au plan du message : on aurait

  • Moins de textes de guerre ;
  • Plus les sacrifices d’animaux qui sont d’un autre temps ;
  • un message universel sans passer par un peuple élu. 

Alors, que faire de l’Ancient Testament (AT), on le garde ou pas ?

Ma question vous paraît peut-être incongrue voire idiote, parce qu’on est nombreux à recevoir depuis tout petit la Bible comme un tout. Mais sachez qu’au 2ème siècle, au temps de l’église primitive, la question s’est posée très sérieusement. Alors que la Bible n’existait encore pas comme un livre constitué, un certain Marcion a proposé de considérer la torah, l’AT comme le livre des juifs et le NT comme le livre des chrétiens. Dans sa compréhension, Marcion opposait le Dieu de justice de l’Ancien Testament au Dieu d’amour du Nouveau Testament. Se voulant très spirituel, il se désintéressait du Dieu créateur au profit du seul Dieu de miséricorde. Mais en l’an 144 à Rome, les anciens de l’Église à Rome ont déclaré que vouloir séparer le Dieu qui se manifeste dans l’AT et le NT était une erreur, une hérésie. Au travers de ces anciens, c’est Dieu par son Esprit-Saint qui veillait sur le message de l’Évangile.

Je vous fais faire maintenant un saut de l’an 144 jusqu’en 1944 dans l’Allemagne nazie. Pendant le nazisme, une partie de l’Eglise s’est perdue. Mais pas l’Église confessante et le pasteur Dietrich Bonhoeffer, emprisonné pour son opposition farouche à Hitler. Il a écrit :

« C’est seulement quand on connaît l’impossibilité de prononcer le nom de Dieu qu’on a le droit de prononcer finalement celui de Jésus-Christ. … Celui qui veut être et sentir trop rapidement selon le Nouveau Testament n’est pas chrétien à mon avis. »

Cette impossibilité de prononcer le nom de Dieu, c’est ce que les Juifs vivaient. Ils avaient développé pour Dieu un respect si profond, mêlé de crainte, qu’ils n’osaient pas prononcer son nom. Ils avaient saisi quelque chose de la sainteté de Dieu. Une sainteté qui risquait de les anéantir, de les consumer s’ils s’en approchaient trop, de façon légère. Ils avaient compris que l’on ne peut pas apprivoiser Dieu, le dompter ou le mettre dans sa poche. Il est Dieu, le Créateur de toutes choses, le Tout-puissant.

Selon Dietrich Bonhoeffer, il faut prendre conscience de tout cela pour prononcer valablement le nom de Jésus-Christ. Il s’agit de comprendre qu’en Jésus, c’est le Dieu saint qui s’approche de nous, lui dont Israël n’osait même pas prononcer le nom.

Ce Dieu saint s’est pourtant révélé petit à petit à Israël. Au fil de l’histoire du peuple, au fil de ses malheurs, de ses guerres, de ses famines, de ses rivalités internes, Dieu leur a parlé et il s’est fait connaître à eux. Tout cet AT nous permet de prendre la mesure de ce que représente la venue de Jésus sur terre : Le Dieu immense, saint et juste, choisit de s’approcher de nous et de devenir un homme.

Les non-croyants, les juifs et les musulmans qui ne veulent pas croire en Jésus-Christ voient souvent mieux que nous ce qu’il y a d’incroyable et d’extraordinaire dans la venue de Jésus.

Alors chers amis, faisons attention de toujours discerner en Jésus, le Dieu saint, celui que l’on ne peut pas apprivoiser, dompter ou amadouer.

Ceux qui aujourd’hui pensent connaître Jésus tout en faisant de lui un grand humaniste ou un sage ou un prophète ont besoin de l’AT.

Tout comme ceux qui pensent pouvoir ramener Dieu à l’état de copain ou de meilleur pote.

Un immense malentendu à propos de Jésus peut surgir si on ne lit du NT que certaines pages et que l’on évacue l’AT. On risque de ne donner à la vie et à la foi chrétienne qu’une dimension horizontale centrée sur les relations humaines. L’AT nous rappelle la transcendance, la présence de Dieu dans le monde, de Dieu qui existe indépendamment de nous.

Pour comprendre qui est Dieu qui se manifeste en Jésus-Christ, il faut prendre l’entier de la révélation, AT et NT.

L’AT va notamment nous permettre de comprendre que si Dieu s’approche de nous, s’il nous aime d’un amour total, il n’est pas pour autant le plus cool de nos copains mais notre Seigneur.

Pour cela je vous invite à reprendre l’histoire de l’Exode et à voir comment Dieu s’est approché de Moïse.

  1. Il se fait connaître par un buisson ardent qui ne se consume pas. Dieu ne se consume pas, il demeure. Ni le feu qui brûle, ni le temps qui nous vieillit, n’ont de prise sur lui. Dieu est Celui qui est, qui était et qui vient.
  2. « Moïse, Moïse !» Il appelle Moïse par son nom. Dieu connaît Moïse alors que Moïse ne sait rien de Dieu. Lorsque, juste après, Moïse lui demandera son nom, Dieu déclarera : Je suis qui je suis. Les Israélites comprendront alors qu’une part de Dieu nous reste inaccessible. On ne peut pas mettre la main sur Dieu.
  3. « Enlève tes sandales » Dieu fait découvrir à Moïse sa sainteté en lui ordonnant de ne pas s’approcher du buisson et d’enlever ses sandales. Dieu n’est pas notre pote à qui on vient taper sur l’épaule. Là où est Dieu, là où Dieu s’incarne, on touche au sacré. Voilà pourquoi, pour nous chrétiens, seul l’être humain, créé à la ressemblance de Dieu est sacré et intouchable.
  4. « Je suis le Dieu de ton père, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. » Dans sa rencontre avec Moïse, il se révèle comme le Dieu de ses ancêtres, le Dieu qui était avant lui, le Dieu qui nous précède en toutes choses.
  5. « J’ai vu comment on maltraite mon peuple. » Dieu voit. Il voit ce qui se passe sur terre. Il voit comment les hommes se traitent les uns les autres. Et en réponse aux cris qui montent à lui, il intervient. Le Dieu qui vient délivrer Israël de la main des Égyptiens et Jésus qui vient nous délivrer du péché ne sont qu’un. Le Fils ne fait que révéler qui est le Père depuis toujours. Le Dieu de miséricorde ne surgit pas de nulle part avec Jésus.
  6. « Je suis venu délivrer les Israélites du pouvoir des égyptiens et les conduire vers un pays beau et vaste. » En Jésus comme dans l’histoire d’Israël, il est le Dieu fort qui conduit hors de tous les esclavages jusqu’à la terre et la vie promise.
  7. « Je t’envoie maintenant vers le Pharaon » Dieu appelle Moïse à son service et il l’envoie pour faire sortir Israël de l’esclavage. Jésus qui vient à nous ne fait pas autre chose. Il nous appelle à son service et nous envoie dans le monde. La révélation de Dieu en Jésus-Christ ne tombe pas de nulle part. Elle s’inscrit dans une longue chaîne d’interventions de Dieu qui exprime sa fidélité et qui nous fait comprendre que Dieu ne lâchera pas l’humanité. De Moïse jusqu’à Jésus, Dieu se révèle comme un berger tenace qui ne lâche pas son bâton de berger et qui n’abandonne pas les siens.

Chers amis, l’Ancien Testament, on peut aussi l’appeler le Premier Testament. Le Premier Testament, la première alliance est nécessaire pour recevoir la nouvelle alliance.

Amen

Luc Badoux

Corsier, dimanche 7 novembre 2021

L’Ancien Testament est-il encore nécessaire à la foi chrétienne?
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