Par Martin Hoegger
Karlsruhe, 2 septembre 2022. La deuxième journée de l’Assemblée du Conseil œcuménique a célébré l’amour de Dieu pour toute sa création. En 1998, l’Église orthodoxe, suivie de plusieurs Églises, a mis à part le 1er septembre comme journée consacrée à la création. Des théologiens orthodoxes ont introduit les quelques 4’000 participants à la profonde spiritualité de leur Église sur ce thème si actuel.
Avec le symbole de l’eau, sans laquelle il n’y aurait ni vie physique ni vie spirituelle (cf le baptême) sur terre, la prière matinale a introduit l’assemblée de manière vivante et priante à ce thème. Au cœur de l’action liturgique, on a réuni des récipients d’eau provenant de chaque continent, un « rassemblement des eaux » reflétant l’acte de la création dans le premier chapitre de la Genèse (v. 9)
Alors que les eaux s’entremêlaient, l’assemblée a affirmé à la fois notre dépendance à l’égard de la création et notre union au Christ ressuscité par le baptême. Par lui en qui habite toute plénitude, Dieu a tout réconcilié sur terre et dans les cieux, comme le dit la lecture biblique du jour tirée de la lettre au Colossiens (1,9)
« Le patriarche vert »
Dans son allocution, le « patriarche vert » de Constantinople Bartholomée – « vert » à cause de son engagement écologique – souligne que la résurrection du Christ nous conduit à changer de regard sur le monde : « Le coeur de l’univers est le Christ, pas nous-mêmes. Quand nous sommes transformés par la lumière de sa résurrection, nous devenons capables de découvrir le but pour lequel Dieu a créé chaque personne et chaque chose ».
Il appelle à un changement radical, en refusant de réduire notre vie spirituelle à nos intérêts personnels et en questionnant nos habitudes de consommation par rapport aux ressources de la création.
L’unité chrétienne appelle à une action écologique commune.
Dans la ligne de Bartholomée, le métropolite Emmanuel de Chalcédoine (également du patriarcat de Constantinople) est convaincu que la recherche de l’unité chrétienne doit aussi conduire à une conversion vis à vis de la création. Nous sommes les intendants non seulement de l’Église mais aussi de la création.
L’année dernière, avec le pape François et l’archevêque de Cantorbéry Justin Welby, Bartholomée a signé une déclaration commune appelant les Églises à se réconcilier et à s’engager ensemble à être de bons intendants de la création. « Si nous ne devenons pas maintenant davantage sobres, nous devrons payer des conséquences terribles. La situation actuelle appelle à l’action commune. L’écologie est une conséquence de notre foi en Christ », affirme Mgr Emanuel.
Dans son rapport, le théologien orthodoxe Ioan Sauca, secrétaire général par intérim du Conseil œcuménique a aussi partagé sa conviction que les questions climatiques et écologiques sont une question théologique. Par son incarnation, le Christ a en effet tout assumé. Le dessein de Dieu en Christ englobe également la réconciliation et la guérison de la création. « Je ne mâcherai pas mes mots : notre planète sera inhabitable dans 50 ans si nous ne modifions pas notre comportement ».
La voix des jeunes
L’assemblée a donné la parole à des jeunes, du nord au sud, de l’est à l’ouest. Julia Rensberg, déléguée de l’Église de Suède, vient du peuple Sami au nord de la Scandinavie. Les autochtones de l’Arctique voient le réchauffement climatique bien plus qu’ailleurs. La justice climatique et le respect des peuples autochtones sont intimement liés. Pour elle, la réconciliation commence par dire la vérité. Il faut que la vérité soit dite sur la colonisation des peuples autochtones. Le Christ aime toute la création et veut la guérir à travers notre pratique de la vérité.
Bjorn Warde, délégué de l’Église presbytérienne de Trinité-et-Tobago, aime les Caraïbes, un endroit magnifique dont il veut prendre soin mais qui subit une forte dégradation environnementale. Elle le résultat de nos actions irréfléchies. « Nous savons que nous n’avons pas été de bons intendants de la création. La coopération entre Églises est essentielle et la voix des jeunes n’est pas suffisamment entendue ».
« Il est très important pour moi de sensibiliser au changement climatique », a déclaré Subin Tamang, un Népalais de 25 ans. « Je vois les effets dans mon pays où les paysans ne peuvent pas récolter le blé et le riz à cause de la sécheresse ».
Avec 25 autres jeunes de moins de 30 ans il a participé au « Groupe Climat » durant l’Assemblée des jeunes qui a précédé l’Assemblée générale. « Ce qui m’a le plus marqué, c’est d’entendre des gens de Fidji, des Philippines et de la région du Pacifique. Les niveaux élevés de l’océan les ont déjà affectés et cela préfigure ce qui nous arrivera. Je crains que les îles des Caraïbes ne disparaissent », a déclaré Tia Phillip, ajoutant : « Dans 50 ans, c’est à l’échelle de ma vie, et de celle de mes neveux et nièces ».
Au Népal, Tamang anime un groupe de jeunes de l’Église baptiste sur le changement climatique. Il s’engage pour que les Églises aient un rôle à jouer pour aider les communautés à s’adapter aux changements climatiques.
Les « conversations Carbone »
Au grand stand de l’Église évangélique réformée de Suisse, un « Brunnen » (nom des ateliers durant l’assemblée) présente les « Conversations carbone », un travail de sensibilisation pour réduire l’empreinte de carbone, soutenu par l’Entraide protestante suisse et l’Action de Carême, du côté catholique. https://voir-et-agir.ch/pour-les-paroisses/conversations-carbone/ La méthode vient d’Angleterre et s’est popularisée dans les Églises comme dans les organisations laïques.
Elle part du constat que la connaissance des faits ne suffit pas pour changer ses habitudes dans la nourriture, la consommation ou la mobilité. Il faut se rencontrer pour en parler. Des groupes de 8 à 10 personnes se réunissent à quatre reprises pendant deux heures avec deux facilitateurs.
Cette méthode permet de discuter sans tomber dans le conflit ou la culpabilisation. Dans une analyse, l’université de Berne a constaté que les gens qui y ont participé ont réduit leur empreinte de manière significative
Les monastères, modèles d’une écologie intégrale.
Une assemblée permet de rencontrer d’innombrables personnes, connues ou inconnues, proches ou lointaines. J’ai eu la joie de rencontrer une amie de longue date, sœur Anne-Emmanuelle, prieure de la communauté protestante de Grandchamp. Elle me partage ce qui s’y vit en termes d’écologie. Inspirée par les travaux de la théologienne catholique Elena Lasida, elle pense, avec ses sœurs, que les monastères, dans leur manière de vivre, peuvent être un modèle d’écologie intégrale, une source d’inspiration pour tous.
Pour elle le lien entre l’écologie et la vie monastique ne se situe pas d’abord au niveau des pratiques « bio » ; il se situe au niveau des quatre relations : à Dieu, à soi, aux autres, à la nature.
S. Emmanuelle se réfère aussi à l’enseignement du pape François dans « Laudato si » qu’elle résume ainsi : tout est lié, tout est don, tout est fragile. La vie monastique, dans son intention profonde, est facteur d’unification de la personne et des personnes entre elles, alors que dans le monde actuel tout est éclaté. En ce sens, un monastère est un lieu paradigmatique de l’écologie intégrale, un lieu où elle peut s’incarner pleinement. Les monastères sont de véritables écosystèmes.
Un arbre, une marche et une prière
A la fin de la plénière sur l’amour de Dieu dans la création, un cèdre est offert par Agnes Abuom, la présidente du Conseil œcuménique, à Frank Mentrup, le maire de Karlsruhe. Il sera planté dans le « Jardin des religions », créé il y a quelques années pour marquer les 300 ans de la ville. Un autre cèdre aussi vieux que la ville s’y trouve déjà. Cet arbre a ce message : « vous ne pouvez pas vivre sans moi » !
Après la plénière, le groupe des jeunes sur le climat a organisé une marche symbolique le long de la zone des tentes d’exposition, avec un appel à la solidarité et l’action sur notre style de vie: « Notre création n’est pas à vendre. C’est le temps de parler moins et d’agir davantage », a conclu une oratrice indienne.
A la fin de cette riche journée, les participants aux vêpres orthodoxes pour la journée de la création ont dit cette prière, avec laquelle je conclus ce deuxième article :
« Protège l’environnement, toi qui nous aimes, car c’est grâce à lui que nous vivons, qui nous sommes animés et que nous existons, nous qui habitons la terre selon ton conseil, afin que nous soyons préservés de la destruction et de l’anéantissement !
Entoure, Christ Sauveur, toute la création de la puissance de ton amour pour les hommes et sauve la terre que nous habitons de la destruction imminente, car c’est en toi que nous, tes serviteurs, avons placé notre espérance » !
Image : la séance plénière sur la création (COE, Hillert)
Bonjour,
Il est triste de voir à quel point nous les chrétiens nous nous sommes éloignés de la Parole de Dieu. Car face aux catastrophes écologiques, sociétales et sanitaires nous sommes porteur de ce message vis-à-vis du monde:
Quand je fermerai le ciel et qu’il n’y aura point de pluie, quand j’ordonnerai aux sauterelles de consumer le pays, quand j’enverrai la peste parmi mon peuple; si mon peuple sur qui est invoqué mon nom s’humilie, prie, et cherche ma face, et s’il se détourne de ses mauvaises voies, je l’exaucerai des cieux, je lui pardonnerai son péché, et je guérirai son pays. (2 Chr. 7:13-14)
Nous vivons effectivement dans un monde de plus en plus impie, dont la perversion se rapproche à grande vitesse de celle de Sodome et Gomorrhe et du temps de Noé. Dieu ne peut pas rester silencieux! Si l’homme, sourd aux signaux d’alarme de Dieu, cherche à s’en sortir tout seul pour pouvoir d’autant mieux vivre dans l’impiété, cela invite des catastrophes encore plus grandes sur lui-même!
En tant que chrétiens notre rôle n’est pas de faire partie des efforts de l’homme à se sauver lui-même! Notre rôle est prophétique pour appeler l’homme à la repentance et à se tourner vers Jésus, son seul Sauveur, pendant qu’il est encore temps, de peur que Dieu envoie ses jugements contre lui!