Gérard Pella médite cette étonnante page de l’Evangile, où Jésus regarde les gens mettre de l’argent dans le tronc…
Vous imaginez ?
Jésus regarde ce que les gens mettent dans le tronc !
Il voit ceux qui mettent une jolie somme.
Il voit aussi une dame qui met deux petites pièces, toutes petites, quelques centimes.
Vous imaginez la situation aujourd’hui ?
Si Jésus regardait ce que nous donnons pendant l’offrande, ce serait gênant !
Surtout que Jésus constate non seulement ce que nous donnons mais ce que nous gardons pour nous :
« En vérité, je vous le déclare, cette veuve pauvre a mis plus que tous ceux qui mettent dans le tronc. Car tous ont mis en prenant sur leur superflu : mais elle, elle a pris sur sa misère pour mettre tout ce qu’elle possédait, ce qu’elle avait pour vivre » (v.43-44).
On peut se demander si cette veuve s’est sentie obligée de donner tout ce qui lui restait quand on lit, deux versets plus haut, que Jésus reproche aux scribes de « dévorer les biens des veuves » (v.40).
Il faut reconnaître que certaines obligations religieuses pèsent parfois très lourd. Je pense à la dîme en l’occurrence.
C’est une pratique magnifique qui consiste à consacrer à Dieu le dixième de son revenu pour répondre non seulement aux besoins religieux mais aussi sociaux et communautaires, comme l’indique Deutéronome 14 :
v.22 : Tu prélèveras chaque année la dîme sur tout le produit que tu auras semé et qui aura poussé dans tes champs.
v.23 : Devant le Seigneur, ton Dieu, au lieu qu’il aura choisi pour y faire demeurer son nom, tu mangeras la dîme de ton blé, de ton vin nouveau et de ton huile, et les premiers-nés de ton gros et de ton petit bétail. (…)
v.27 : Quant au lévite qui est dans tes villes, lui qui n’a ni part ni patrimoine avec toi, tu ne le négligeras pas.
v.28 : Au bout de 3 ans, tu prélèveras toute la dîme de tes produits cette année-là, mais tu les déposeras dans ta ville ;
v.29 : alors viendront le lévite (…), l’émigré, l’orphelin et la veuve qui sont dans tes villes, et ils mangeront à satiété, pour que le Seigneur ton Dieu te bénisse dans toutes tes actions. »
C’est magnifique, vous ne trouvez pas ?
C’est magnifique si cela reste un appel, mais ça peut devenir écrasant si cela devient une obligation imposée sans discernement. Prenons un exemple :
Si on impose la dîme à tous, la personne qui a un revenu de 10’000 francs donnera une grosse somme… mais il lui restera 9’000 francs pour vivre, tandis que la personne qui a un revenu de 3’000 francs donnera une plus petite somme… mais cela prendra sur son nécessaire.
Voilà ce que Jésus fait remarquer à ses disciples :
- Les riches prennent sur leur superflu
- La veuve prend sur son minimum vital.
Il est donc injuste d’imposer à tous la même chose.
Notez bien ! Nous naviguons toujours entre les deux extrêmes, entre le rigorisme qui impose la dîme et le laxisme qui se contente de donner le minimum.
Vous me permettez de vous poser une question indiscrète ? Dans votre budget, il y a certainement une ligne pour la santé et notamment les assurances maladies qui augmentent si douloureusement. Est-ce qu’il y a aussi une ligne pour les dons ou est-ce que vous donnez simplement un peu de votre superflu e temps en temps ?
L’apôtre Paul encourage clairement ses lecteurs à donner, mais à donner sans contrainte :
2 Corinthiens 9 :
v.6 : « Qui sème chichement
chichement aussi moissonnera
et qui sème largement
largement aussi moissonnera !
v.7 : Que chacun donne selon la décision de son cœur, sans chagrin ni contrainte, car Dieu aime celui qui donne avec joie. »
Si je reviens à notre page de l’Évangile de Marc, je constate qu’elle ne se contente pas de parler d’argent. Qu’est-ce que nous y découvrons ?
3 choses :
- D’abord que Jésus regarde et valorise les petites gens, comme cette veuve sans argent. Ces personnes que nous aurions tendance à négliger parce qu’elles n’ont rien à offrir, ou trois fois rien…
Jésus, dans la même page de l’Évangile, met en garde ses disciples contre les scribes « qui tiennent à occuper les premiers sièges dans les synagogues et les premières places dans les dîners ».
Et, juste après, il met en valeur cette femme apparemment insignifiante.
Aujourd’hui encore, nous avons tendance à donner plus d’importance à ceux qui occupent les premières places, dans le sport, les Jeux Olympiques ou Paralympiques ont mis en valeur celles et ceux qui ont réussi à prendre les premières places.
Mais c’est le cas également dans l’économie, dans la politique ou dans l’Église : on s’intéresse à celles et ceux qui occupent les premières places plutôt qu’à celles et ceux qui sont relégués dans l’ombre. Ce n’est pas l’Évangile !
- Jésus regarde et valorise les petits gestes.
Cette dame donne les deux plus petites pièces de monnaie qui existent à l’époque. Elle doit se dire : je suis désolée, je n’ai rien de plus à donner.
Elle doit peut-être même se sentir inutile, minable, comme certaines personnes qui ont beaucoup donné d’elles-mêmes quand elles étaient actives et qui se retrouvent en EMS. Elles se sentent inutiles et se demandent « A quoi est-ce que je sers ? », « Qu’est-ce que je peux encore apporter aux autres ? ».
Jésus regarde et valorise les petites gens et les petits gestes.
Il valorise le peu que tu peux encore donner !
- Jésus ne culpabilise pas, il motive !
Effectivement, c’est étonnant : Jésus ne critique pas ceux qui donnent de leur superflu, mais il donne en exemple celle qui donne tout ce qu’elle a.
L’Évangile est là : non pas avec les scribes qui savent mais avec celles et ceux qui se donnent.
Vous en connaissez ?
Ils incarnent l’Évangile !
Je pense à cette dame qui a accompagné son mari atteint d’Alzheimer de toutes ses forces, jusqu’à ce qu’elle soit hospitalisée pour des problèmes cardiaques. Il a fallu cela pour qu’elle puisse se résoudre à le confier à un EMS.
Je pense à ce couple qui accompagne depuis tant d’années leur fils autiste. Tout leur emploi du temps, toutes leurs vacances sont impactés par cette prise en charge.
Je pense à cette maman qui est au bout du rouleau à force d’espérer et de veiller sur son fils handicapé.
Je pense à ce couple qui a galéré pendant 7 ans avec leur fille anorexique. Quand, enfin, elle s’en est sortie, c’est le père qui a craqué et qui a eu besoin de soins.
Vous me direz peut-être : ce n’est pas raisonnable ; ils en font trop !
Comme cette veuve pauvre qui donne tout ce qui lui reste. Elle en fait trop !
Comme ces Églises qui connaissent la persécution parce qu’elles se donnent au lieu de se cacher. Ce n’est pas raisonnable !
Jésus les regarde et les valorise parce que c’est la façon de vivre qu’il a choisie, lui aussi. Ce n’est pas raisonnable :
« Lui qui est de condition divine
Il s’est dépouillé lui-même
Prenant la condition de serviteur » (Philippiens 2.6-7).
Il a tout donné pour des humains qui le bafouent…
« Mon corps, donné pour vous…
Mon sang, versé pour vous et pour la multitude, pour le pardon des péchés »
« Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. »
Gérard Pella, pasteur.
Prédication du 20 octobre 2024 à Corsier. Marc 12 : 38-44 (TOB)
Cher Gérard,
Je viens de lire ton message sur tout donner sur R3, j’ai bien aimé Jésus qui regarde ce que les gens donnent. J’ai appris que notre pasteur ne veut pas savoir ce que les gens donnent, et c’est assez sage, ainsi il n’est pas influencé. Je pense aussi que Jésus ne parle plus de dîme mais nous encourage à donner, bien plus que la dîme pour ceux qui peuvent. Je suis dans le monde évangélique et pourtant je pense que la dîme est une libération pour les riches et une pression, un asservissement ….. pour les pauvres et que nous ne vivons plus sous la loi. Mais quand j’étais dans l’église protestante , je pense qu’on n’apprenait pas aux gens à donner, cela vient que les pasteurs sont payés par l’Etat. J’ai suivi, offert par un chef d’entreprise ,un séminaire avec Chantal, sur la générosité. C’était super de se remettre en question sur nos biens.
Que Jésus vous bénisse.
H-L