Avec clarté et conviction, Hetty Overeem, pasteure d’Evangile en Chemin, démasque les racines qui nourrissent la maltraitance des enfants. Elle montre ensuite que les mêmes racines nous amènent à maltraiter Dieu lui-même. D’où l’appel à une metanoia radicale et urgente.
Dans la semaine de « cœur à cœur », en décembre 2020, j’ai eu le privilège de participer toute la nuit de mercredi à jeudi à l’émission radio soutenant cette initiative.
On était quatre, une petite famille pour une nuit : les deux journalistes Yves-Alain Cornu et Jérôme Zimmermann, et nous, les deux invités :
Niels Weber, président de la gamer-federation et psychologue/ psychothérapeute spécialisé dans l’accompagnement de personnes prises au piège par la dépendance des games.
Et moi, pasteure-nomade, en chemin avec Dieu et les gens.
C’était une chouette expérience, riche, comme le disait Niels, en découvertes et en mandarines (et biscômes!).
On parlait de beaucoup de choses, mais aussi du fil rouge de cette semaine : la maltraitance, l’abus des enfants, et les formes et expressions multiples que cette maltraitance peut prendre, et contre lesquelles il s’agit de lutter de toutes nos forces.
A un moment, Yves-Alain m’a posé la question : « Quand on voit tout ce qui se passe, il y a quand-même une faille dans le système, non?! »
Je ne sais plus ce que j’ai répondu. Mais je sais que j’ai été maladroite, car je n’ai pas pu dire ce que je pense. A savoir que, oui, il y a effectivement une faille dans le « système humain » – et que, bonne nouvelle, on n’a pas besoin de continuer à la subir.
Car c’est une dépendance, et il existe une thérapie et un accompagnement pour en sortir. Mais pour ça, il faut bien voir cette dépendance, la reconnaître et la confronter. Et ce n’est pas facile, car il s’agit de notre dépendance d’une illusion.
Une illusion sur Dieu d’abord. Et ensuite, comme conséquence, des illusions sur nous-mêmes, et le monde.
Pourquoi ne parle-t-on jamais de notre maltraitance de… Dieu?
Et les formes et expressions multiples que cette maltraitance peut prendre, et contre lesquelles il s’agit de lutter de toutes nos forces.
C’est en tout cas ce que Dieu nous demande. Puisque le Désir de Son coeur, c’est d’être AIMÉ par nous de toutes nos forces –
(« Tu aimeras le SEIGNEUR, ton Dieu… » Deutéronome 6, 5, repris par Jésus en Marc 12, 29-31, où il ajoute Lévitique 19, 18, « et tu aimeras ton prochain comme toi-même »).
– et puisqu’on ne peut pas aimer en maltraitant.
Ce qui complique les choses, c’est qu’on ne maltraite pas nécessairement, ni Dieu ni notre prochain (ni soi-même d’ailleurs), par méchanceté pure et dure. Souvent c’est parce qu’on subit ET choisit une illusion. C’est d’autant plus dangereux que c’est caché.
Il y a longtemps, je me suis formée au Danemark dans l’accompagnement spirituel de personnes abusées : physiquement, émotionnellement, sexuellement, spirituellement aussi.
Ce qui me frappe toujours et me fait froid dans le dos – car justement, c’est caché – c’est la pensée, l’attitude DERRIÈRE l’abus. Sa source, dont découle sa dynamique, dont découle le résultat. C’est :
la fausse image/perception/ représentation de l’autre.
Il ou elle n’est pas perçu comme quelqu’un D’AUTRE, au fond. Avec son identité propre, son vécu propre, ses droits propres. Et surtout : dans la totalité de son être.
Non, l’autre est perçu comme une sorte de prolongement de nous-mêmes et de nos désirs, dans une fausse continuité de notre être. Notre être, faussement perçu comme le centre du monde.
Ce qui justifie tout et n’importe quoi.
Dans cette fausse perspective, dans cette ILLUSION sur nous et sur l’autre, cet autre devient quelqu’un « pour-nous », à notre service. Un objet, pour satisfaire nos désirs, nos impulsions, nos soi-disant besoins. Sexuels, émotionnels, oui, et spirituels aussi.
Dans cette dynamique, on « fait le tri » de l’autre : on ne VOIT, et alors, on ne PREND que ce qui nous convient, ce qui nous est utile.
C’est une perception totalement tordue de la réalité – et c’est totalement horrible. D’autant plus qu’une illusion ne reste jamais seule, mais en produit toujours d’autres.
Et, tant que l’abuseur n’a pas reconnu cette fausse image comme fausse, tant qu’il n’a pas compris d’où elle vient, et travaillé pourquoi elle a pu autant l’emprisonner et l’empoisonner … et ensuite, tant qu’il ne l’a pas confrontée, pour enfin y renoncer définitivement, il risque de reproduire ses actes encore et encore.
Car ces actes sont le résultat, pas le problème à sa source ; les symptômes, et pas la maladie, qu’il faut traiter pour guérir.
La maladie de l’illusion.
Comme je l’ai déjà dit : l’illusion de l’abuseur sur l’autre – mais aussi sur lui-même. Tant qu’il n’a pas vu qu’il est aussi empêtré dans une fausse image de lui-même, il risque de rester sur cette voie destructrice, toute sa vie.
Car – attention, je ne le dis absolument pas pour justifier ou relativiser quoi que ce soit!, c’est juste une réalité qu’il s’agit de comprendre – un abuseur est très, très souvent quelqu’un qui a été abusé lui-même dans son enfance.
C’est dramatique, toutes ces fausses images, ces illusions, qui disent sur l’autre, sur nous-mêmes, des mensonges. Des mensonges qui SEMBLENT justes, puisque les émotions les soutiennent, leur donnent raison.
Pour ne pas devenir trop long, je prends juste quelques exemples d’illusions sur soi-même :
- T’es nul, de toute façon.
- Tu es tout-puissant (c’est étrange, mais les deux vont ensemble!)
- Tu ne vas jamais t’en sortir
- Tu peux tout te permettre.
- Tu n’es qu’une poubelle.
- Tu es grand, immense, génial.
- Pauvre con (ne).
– Tu es le centre de tout l’univers.
– Ta vie ne vaut rien. Donc la vie des autres non plus.
– Ta vie est la plus importante, toutes les autres vies y sont subordonnées.
– On t’a fait souffrir. Maintenant tu as le droit de faire souffrir les autres.
– Tu vas enfin t’occuper de toi et trouver le « bonheur », et tu vas écraser tout ce – et tous ceux – qui pourraient te freiner dans cet élan… »
Et ainsi de suite.
Quelle immense tristesse, quelle prison sordide… et quelle violence!
Mais – bonne nouvelle! – on peut en sortir. On peut devenir libres!
Pour ça il faut renoncer, définitivement, à l’illusion sur l’autre ET sur nous-mêmes.
Faire pour ainsi dire demi-tour. Sortir de l’aveuglement.
Pour entrer dans la bonne perception de l’autre et de nous : reconnaître, accepter, respecter, adhérer à sa réalité, à qui on est réellement.
Apprendre à voir, au fond!
Comme Dieu nous voit, Lui, LA Réalité absolue, Lui qui nous a créés.
Oui, Dieu, justement, il est où dans tout ça?!
Pourquoi je dis qu’on le maltraite, Lui aussi? Et est-ce qu’il y a un lien entre les deux sortes d’abus ?
J’ai constaté qu’on reproduit exactement le même comportement avec Lui, le TOUT AUTRE, qu’avec l’autre, notre prochain, car on projette sur Lui exactement les mêmes fausses images :
Dieu n’est pas perçu comme quelqu’un d’autre, au fond. Il n’est pas considéré dans Sa Réalité propre, Son Identité propre. Et surtout : dans la totalité de son Être.
Non, Il est perçu comme une sorte de prolongement de nous-mêmes et de nos désirs, dans une fausse continuité de notre être.
Notre être, faussement perçu comme le centre du monde.
Ce qui justifie tout, et n’importe quoi : pas d’abord dans nos actes, mais dans ce que nous pouvons penser et dire sur Lui.
Les actes suivront tout seuls.
Ainsi, nous »produisons » notre propre spiritualité, qui ne vient pas de Dieu, mais de nous. Une spiritualité qui tourne autour de nous ; qui a l’humain comme source, chemin et objectif final. Tout en gardant l’enveloppe d’une sorte de « spiritualité », qui SEMBLE parler de Dieu. Mais qui, au fond, veut Le faire tourner autour de nous, Le subordonne à nous et nos critères.
Comme si la terre revendiquait d’être le centre, autour duquel tourne le soleil, ainsi l’humain vit dans l’illusion qu’il est le centre, autour duquel tourne Dieu. L’humain est devenu sa propre idole.
Devenu? Disons, c’était le piège de l’humanité depuis le début! Mais aujourd’hui on est devenus particulièrement experts … en l’illusion.
Et ça influence tout, tord tout, abime tout : d’abord la relation avec Dieu, ensuite celle avec les autres.
Car la première entraîne la deuxième, comme une mauvaise copie, une caricature, de l’Original, qui vient de Dieu :
Toi, humain, tu M’aimeras d’abord Moi, ton Dieu. Et ça t’aidera à aimer ton prochain et toi-même d’une manière nouvelle, que Moi-même Je veux t’apprendre!
Dans l’illusion, tout ça se perd et devient une caricature. Dieu – nous – et l’autre. Et la caricature ne peut pas honorer. Car elle ne dit pas la réalité.
Dieu devient, dans cette illusion, la caricature de quelqu’un « pour-nous ». Non pas à aimer, à chercher, à vouloir pour Lui-même, mais d’abord pour ce qu’Il pourrait nous apporter. Un objet, pour satisfaire nos désirs, nos impulsions, nos soi-disant besoins :
« Donne-moi ceci, fais-moi cela..
Enlève-moi ceci, guéris ça, change ceci, améliore ça. »
Pour arriver à cela on prend dans Sa Personnalité uniquement ce qui nous convient, ce qui nous est utile, ce qui confirme ce qu’on pense déjà.
(D’où aussi les abus « au nom de dieu » …)
Cette illusion sur Dieu nous emprisonne, nous empoisonne la vie, car elle emprisonne et empoisonne notre regard. Elle influence et tord tout.
Et, tant qu’on n’a pas reconnu que cette image est fausse, tant qu’on n’a pas compris pourquoi elle est là, en quoi et comment elle a pu autant nous emprisonner et nous empoisonner … et ensuite, tant qu’on ne l’a pas confrontée et, enfin, tant qu’on n’y a pas renoncé définitivement, on va reproduire encore et encore notre humanité malsaine. Même en étant de bonne volonté. Et j’ajoute : même si on arrive parfois à la décorer avec plein de petites « perles », qui sont vraiment belles, comme cet élan de « Cœur à cœur ». Car là où on a perdu la Grande Perle de la Réalité de Dieu, notre humanité va rester étrangement pâle, notre vie un peu vide de sens.
Mais comment elle se manifeste, concrètement, cette illusion sur Dieu? On pense et on dit quoi, à ce moment-là ?
J’essaye de répondre :
« Toi, Dieu, tu n’existes pas réellement. Tu n’es pas réellement réel, alors on peut te subordonner à nos idées, nos désirs.
On ne prend de toi QUE ce qui nous convient ( voilà, exactement ce qui se passe dans l’abus des enfants), QUE ce qui nous semble raisonnable, agréable, acceptable, compréhensible, productif
(de notre bien-être, physique ou psychique ou spirituel ou, en général, les trois à la fois), efficace, amenant une bonne réputation, de bonnes actions
(selon NOS critères!),
de bons chiffres, de bonnes « prestations » …
Ce dernier exemple, c’est un des pièges, je crois, de l’Eglise, qui s’est mise elle-même dans le moule d’une multitude de « on » : organisation, information, communication, planification, évaluation… mais qui laisse en rade la RelatiON, avec Dieu d’abord.
Comme si l’objectif suprême de l’Eglise était de se faire marcher elle-même.
Bien sûr, il y a une réalité à accepter, des choses à organiser, planifier etc. Mais ces choses ont souvent pris le dessus sur la simple recherche de Dieu :
« Seigneur, qui es-Tu?! Nous te connaissons déjà un tout petit peu, mais nous avons soif de Te connaître mieux, nous Te cherchons, de tout notre cœur, pour T’aimer, de tout notre cœur, nos forces, et notre intelligence aussi! Viens Te révéler, c’est essentiel, c’est urgent, car sans Toi nous ne pouvons pas vivre! Sans toi nous sommes et restons dans l’illusion, viens nous montrer la Vérité sur Toi, de plus en plus. Viens nous dire Toi-Même qui Tu es, et pardonne-nous d’avoir fait de Toi un dieu-à-notre-image. Viens nous arrêter, viens casser nos idoles, nos buts-en-soi, pour qu’il y ait de la place pour TOI! »
Au lieu de cette recherche joyeuse, l’Eglise répand souvent (et elle est connue pour) un message de fausse tolérance, venant du tri que je mentionnais : tout ce qu’on dit sur Dieu se vaut. A chacun sa vérité, on se complète, nos différentes « couleurs » se complètent et forment ensemble la réalité de Dieu.
Ce qui revient à dire qu’il n’y a pas de Réalité de Dieu, car pas de Vérité sur Lui. Ce qui rend Dieu … superflu.
Et l’Eglise aussi. Car elle a perdu sa spécificité.
Et Jésus-Christ, et son message aussi.
Lui qui ne disait jamais : « Oh, Dieu vous trouve sympas de toute façon, moi je ne suis qu’une couleur, on peut tout aussi bien dire le contraire. »
Jésus a dit que lui seul était le chemin et la vérité, et que personne ne pouvait venir à Dieu sauf à travers lui (Jean 14).
Ainsi on « maltraite » Dieu non seulement dans la société, mais aussi dans l’Eglise.
Ce qui reste, ce sont des « valeurs », avec l’avantage que celles-ci sont en général bien tolérées… car elles sont celles d’un monde « un peu meilleur », qui se fabrique lui-même un peu meilleur…
Ainsi tu nous sers, Dieu, tu sers encore à quelque chose, t’es encore utile et c’est très bien, merci beaucoup… »
Ouf, je suis dure! Je me rends compte. Ce n’est pas du tout spirituellement correct. Ou bien, que si!, mais selon les critères de l’Evangile.
Je le redis :
Quelle illusion! Et … quelle horreur. Car chacune de ces tentatives de mettre Dieu à NOTRE image, aussi sympathique que le résultat puisse apparaître, est en réalité un abus de Dieu. Qui entraîne – et c’est un drame pas reconnu – l’abus des autres et de nous-mêmes.
Car c’est l’illusion sur Dieu, qui est à la racine, sur laquelle se greffent toutes les autres (pardon, je suis un peu répétitive, je sais, mais je crois que c’est si important),
celles sur l’autre et sur moi-même. Triple dépendance donc …
Mais quelle est la réponse de Dieu alors?!
C’est simple … Trop simple pour beaucoup de gens, mais voilà, c’est la thérapie de Dieu : Revenez à Moi!
Voyez-Moi juste, c’est-à-dire, comme Je SUIS, et comme Je Me suis fait connaître en Jésus-Christ, à travers la Bible. Par le Saint-Esprit, « eye-opener » par excellence, Je me révèle, Je me donne, pour que vous puissiez …
… non, pas avoir la Vérité sur Moi dans votre poche, pour la distribuer avec condescendance à d’autres, ou même l’imposer! Non!
Mais pour que vous la découvriez, de jour en jour, pour qu’elle vous rende LIBRES! (Jean 8, 30-36).
Car Moi, Dieu, je vous ai créés libres, et ensuite, quand vous avez choisi vos prisons de l’illusion, J’ai envoyé Jésus, pour balayer ces illusions sur Moi et restaurer la Vérité sur Moi, pour l’écrire dans votre coeur!
J’ai envoyé Jésus, cœur de mon Cœur, lui, la parfaite image de Ma Réalité, pour VIVRE Qui Je Suis.
Et si vous êtes d’accord de M’écouter et de l’inviter dans votre coeur, votre vie, vos critères, pour qu’il y règne … Je vous promets qu’il va venir! Qu’il va habiter votre être, en vous « contaminant »( c’est le cas de le dire!) depuis l’intérieur, et ainsi Je serai Moi-même en vous : Mon Cœur dans le cœur de Jésus, son coeur dans le vôtre : LE grand coeur à coeur de la création !
Alors oui, moi Hetty, j’ai envie d’entrer dans cette invitation de Dieu, j’ai de plus en plus soif de revenir à Lui.
Mais pour ça je dois d’abord m’arrêter. Arrêter l’abus, arrêter mes maltraitances, souvent inconscientes, de Lui.
M’arrêter. Faire de la place. Pour apprendre à L’aimer.
Sortir de mes illusions, me LAISSER sortir par Lui de mes nombreuses illusions-de-Hetty. Pour entrer dans Sa Réalité.
En Christ. C’est ça ce que Jésus annonce comme le Royaume de Dieu.
Et c’est ça aussi que j’ai envie de dire autour de moi. Je serai sûrement maladroite, comme à la radio. Peu sûre, parfois confuse, malheureusement encore trop dépendante du regard des autres. Pardon, mon Dieu.
Et c’est ça que j’ai envie de dire à l’Eglise, à toute l’Eglise :
Arrêtons-nous! Arrêtons, une semaine au moins, pour nous rendre compte de nos illusions, pour demander au « Professionnel de service », au Saint-Esprit, de nous les démasquer, pour que nous puissions les reconnaître, les confronter, et enfin, y renoncer.
Arrêtons-nous, une semaine au moins : nos « on », nos organisations, planifications, communications, évaluations. Et même nos bonnes actions!, qui sont comme des petites perles, mais qui nous font croire que tout va bien, qui prennent ainsi la place de la Grande Perle qu’est Dieu Lui-même … et qui deviennent alors des idoles.
Arrêtons un TOUT petit moment – et je vais choquer mais j’assume – même l’amour du prochain. Non pas parce qu’il ne serait pas important!
Mais parce qu’il risque toujours de remplacer le premier commandement, l’Amour pour Dieu.
J’exagère?
Au moment où j’écris ces lignes, je tombe sur un article du Migros-Magazine du 22 décembre 2020 consacré à Rita Famos, élue à la présidence de l’Eglise évangélique réformée de Suisse. Elle dit : » … Le commandement qui est, selon Jésus, le plus important : tu aimeras ton prochain comme toi-même.
Et (ah, quand-même, mais ça vient après seulement) tu aimeras Dieu. »
Oui, mais quel Dieu?! Quel Jésus?!
Car Jésus a répété que le premier commandement, le désir principal de Dieu, la toute première priorité, c’est d’aimer Dieu (Marc 12, 30).
Puis, comme conséquence, il a enchaîné : » Le deuxième, c’est d’aimer ton prochain comme toi-même. » ( Marc 12, 31)
Mais tant qu’on fait ce raccourci malsain, en « sautant » la Priorité, notre amour du prochain gardera toujours un goût de déjà vu, déjà essayé… et pas si bien pu que ça.
Il y a une faille dans le système…
Arrêtons l’illusion qui nous fait croire qu’on aime Dieu assez si on aime son prochain, comme si les deux étaient les mêmes. Non, ils ne le sont pas, Dieu ne s’est pas trompé en parlant d’une Priorité absolue – et d’une conséquence : un amour nouveau. Une charge légère (Matthieu 11, 28-30), différente, car vécue dans un ENSEMBLE merveilleux et plus fort que tout.
Un amour nouveau! A quel défi, quelle aventure, Dieu nous invite par ce premier commandement!
Un amour sûrement tâtonnant. Probablement pas souvent extraordinaire. Peut-être pas dans l’événementiel. Peut-être pas relaté dans les journaux – et peut-être que si, mais peu importe.
Car cet amour sera vrai, et durable, cette fois. Puisqu’il viendra de Dieu-dans-notre-coeur, en Jésus.
Alors il aura le goût de ce que Jésus appelle le Royaume, cet ENSEMBLE : à chercher et à trouver de toute urgence!
Car c’est lui, et lui seul, qui réparera « la faille dans le système ».
L’être humain ne se guérit pas tout seul de sa dépendance de l’illusion, il a besoin que Quelqu’un l’en SAUVE.
Un avant-dernier mot :
Pourquoi on essaye toujours d’échapper à l’amour pour Dieu d’abord, la Relation de toutes relations ?
Peut-être parce que c’est plus contrôlable, vérifiable, et, oui, plus confortable, parce qu’on peut toujours faire des choses, et ça, ça on sait faire.
Tandis que, se concentrer sur la Réalité de Dieu? Lui demander de se révéler ? Sans voir tout de suite un beau résultat?
C’est compliqué pour nous, surtout aujourd’hui. Pour au moins deux raisons.
La première raison est que nous sommes devenus sédentaires. Et que nous avons adopté la logique, la dynamique, la mentalité sédentaires.
( Oui, je sais, ça devient long! Mais je crois que c’est important pour comprendre le piège). Il y a la dynamique nomade – et la dynamique sédentaire.
Le nomade vise le chemin et vit le chemin ; il EST en chemin, constamment. L’objectif même n’est pas une chose, mais justement d’être en chemin, et les rencontres qui s’y vivent, y sont données.
Le sédentaire vise le résultat, vit pour le résultat. Un résultat vérifiable, contrôlable, chiffrable, rentable. Le résultat décide si le chemin est bon ou pas.
Aujourd’hui nous sommes devenus totalement « sédentaires » : totalement orientés sur le résultat ; la société en général… et l’Eglise.
Orientés sur le résultat : l’objectif et les moyens pour l’atteindre ; les chiffres pour le mesurer. Le but étant un but en soi : efficacité, rendement, succès… réputation, visibilité…
Que des esclavages, des dépendances, des prisons intérieures …
(Entre parenthèses : je suis si triste du nombre de personnes que je rencontre, beaucoup de jeunes aussi, qui souffrent de cette immense pression du résultat :
Tu dois, tu devrais, tu aurais dû…
Tu dois réussir – et c’est nous qui te dicterons ce que ça implique.
Tu dois être heureux – et les pubs vont te dire ce que c’est…)
La vie devient une prestation … au lieu d’être un cadeau de Dieu. Au secours!
Ce n’est pas anodin que Jésus, lui, ait été nomade. Son plus grand Objectif était la relation avec Dieu et le partage de cette relation.
Puis ensuite venait tout ce que cette relation portait comme fruit : libérations, guérisons, restaurations…
Je pense que, si nous osons revenir à Dieu, il y a quelque chose de cette liberté nomade que nous allons re-découvrir. Si nous sommes d’accord de faire de la place, de renoncer, de nous arrêter.
Ce n’est d’ailleurs pas tout facile, et j’en sais quelque chose puisque c’est cette vie nomade que j’ai choisie, tout en étant préprogrammée par une société et une éducation sédentaires.
Fallait et faut en sortir! Urgemment!
Car les lois de ce sédentarisme-là, qui est presque spirituel, nous emprisonnent, nous empoisonnent, car elles abusent de nous et nous apprennent à abuser des autres et de la création.
Heureusement que Dieu nous aime et alors, nous vise, nous. Pour qui nous sommes. Mais : qui nous sommes en réalité, comme Il nous a façonnés dans Son coeur!
Donc aussi : comme nous allons devenir !, si nous le voulons.
Dieu-comme-Il-EST
vise
nous- comme-nous-sommes.
Et Il va tout inventer pour nous rendre notre personnalité perdue.
Quelle libération de pouvoir être en route, avec Lui vers Lui, en tâtonnant, en se trompant, pas grave! En Le connaissant toujours mieux comme Il est réellement : intimement, joyeusement, allant de découverte en découverte, toujours en chemin. Laissant derrière nous toujours plus ces illusions qui nous empoisonnent la vie – et celle des autres.
Voilà une première tentative de réponse à la question, pourquoi on s’est fait, et on se fait, constamment piéger ?
Et voici une deuxième, en très/trop résumé :
Parce que Satan, l’adversaire de Dieu et de l’humain, qui veut notre destruction, l’expert en fausses images, en illusions, ne loupe aucune occasion pour glisser ces illusions dans notre coeur.
Des fausses images sur Dieu, car lui, lui sait que c’est la source et la dynamique de tout mal. Et ensuite des fausses images sur nous-mêmes et sur notre prochain.
Qu’est-ce qui me fait dire ça? C’est la Bible qui me fait dire ça.
Cette « expertise » de l’adversaire, est décrite dans le langage (symbolique, selon moi) du début du livre de la Genèse :
« Dieu a sûrement dit…?! »
Au début, l’être humain résiste encore : » Euh, non, il a dit autre chose… »
Mais l’adversaire persiste : » C’est qu’il ne veut pas de concurrence, Dieu! Il veut te garder petit et insignifiant. Mais … tu peux lui échapper ! Fais ce que moi, je te propose, et tu verras : tu seras grand et tout-puissant, ça sera toi le centre du monde, et alors tu feras ce que tu veux … » ( ma libre reformulation des mots!)
Et « Adam », l’humain, le croit.
Et nous, aujourd’hui, on le croit. C’est ça, le péché.
Jésus, lui, a résisté. Matthieu 4 raconte comment il a refusé l’illusion, ou mieux, les trois illusions présentées pourtant si habilement : ça aurait pu être vrai … !
Mais Jésus connaît trop bien son Père pour tomber dans le piège. Et c’est ça qu’il nous faut apprendre aussi : connaître le Père, pour devenir libres! Apprendre, ré-apprendre la réalité, par le Christ habitant notre coeur.
Jésus-Christ-en-nous, qui dit à Dieu : « Je T’aime! Sois Tout-Toi en tout-moi!
Sois Tout-Toi, mon Dieu …
Pas le bout convenable. Pas mon tri personnel. Pas le spirituellement correct, décidé par l’esprit du temps.
Non. Toi, réellement. A mes risques et périls! Pour le meilleur et pour le pire!
… en tout-moi.
Pas le bout convenable. Pas le tri fait par qui que ce soit – et serait-ce par moi-même! Pas ce que me dictent la société ou mon éducation ou mes blessures ou les abus que j’ai vécus – et/ou commis.
Non. Moi. A TES risques et périls, mon Dieu! Pour le meilleur et pour le pire! »
Coeur à coeur…
Hetty Overeem, pasteure d’Evangile en Chemin, janvier 2021.